S'aimer, veiller
" Parfois le silence règne, nous sommes paisibles et concentrés, la lumière est belle et notre regard vigilant : alors l’émerveillement nous saisit. D’où vient ce sentiment fugitif ? "
Belinda Cannone
Le dernier opus de l'auteure est irrésistible
Cela fait deux ans - jour pour jour - que je suis lecteur de la production conséquente de la romancière et essayiste Belinda Cannone. Nous nous sommes rencontrés trois fois à Paris, d'abord à La Reine Blanche puis dans un salon du livre dans le Marais et dernièrement à la Maison de la poésie : une conversation dans la vraie vie de sept minutes, un échange de sept mails élémentaires. C'est peu mais précieux.
Me voici donc avec son nouveau livre. Du Cannone caractérisé.
Fragile et beau comme des coquelicots de bord de gare
J'ai donc lu le dernier opus de l'auteure : "S'émerveiller". C’est un objet curieux ce livre, instable, malicieux, étayé, faisant chatoyer son tissu, profond, délicat. De la soie sauvage. C’est fragile et beau, comme de rares coquelicots de bord de gare, sonnés et combatifs. C’est enchantant, comme un secret, c’est écrit chuchoté, d’ailleurs.
Pour ne pas réveiller le concert d’enfer qui est le bruit du monde.
S’émerveiller dit-elle
C'est écrit en "canon", forcément, avec une triade mélodique : résider, désirer, sidérer. Qui fait bande de Möbius et ruban à son front. En mille et une histoires savamment modestes, l'auteure nous projette - écran panoramique - son "road movie" intime.
C'est d'une charge poétique intacte. D'une ferveur toute charnelle, d'un impérial aplomb qui sont aussi incarnés par un visage aux yeux noisette et une accorte silhouette à mèche brune.
On se sent alors requis dans un pur présent qui n’attend rien.
©Antoine Campo